Comme le prouvent les violences qui ont éclaté en France ce mois de juin entre les Taxis et les Uber, nous assistons à la destitution d’un monopole par un autre. Et en tant que consommateurs atteints du syndrome de Stockholm, nous souhaitons la bienvenue à notre nouveau ravisseur. Uber nous débarrasse des taxis, mais qui nous débarrassera d’Uber ?
Bien assis dans mon canapé, je regarde la lutte Taxi vs Uber pour avoir le droit de nous transporter dans la ville. Mon feed Facebook déborde de posts sur le sujet et les journaux utilisent le terme Uberisation dans tous leurs articles comme s’il s’agissait d’une maladie. Ces chamboulements arrivent dans tous les secteurs, pas seulement dans le transport.
Et nous, où est ce qu’on va dans tout ça ?
Uber a déjà gagné (mais le problème est ailleurs)
Uber gagne contre les taxis, AirBNB gagne contre les hôtels et Amazon gagne contre tous les autres.
Voilà, si vous n’en étiez pas sûrs, c’est dit. Pourquoi ? Ils offrent un meilleur service pour moins cher. Rien d’autre.
Ces startups exploitent les nouveaux moyens technologiques (marketplaces, APIs, plates-formes web et mobile) pour mettre en relation facilement offre et demande et proposer ainsi un meilleur service. Ils ne fournissent même pas le produit ou le service eux-mêmes, c’est leur réseau qui le fait à leur place (par exemple les chauffeurs Uber sont des indépendants qui disposent de leur propre véhicule). Habile.
Aucun secteur ne peut lutter contre cela, et encore moins les monopoles conservés artificiellement jusqu’à présent (SNCF tu es sur la liste noire).
Ma vision en tant que développeur et entrepreneur (je suis co-fondateur de Buddyweb et Case) ne laisse aucun doute : tous les secteurs vont changer brutalement dans les années à venir. Des services comme TaskRabbit ou Alfred (les Uber du service à la personne et de diverses tâches à domicile) vont arriver chez nous et bousculer encore plus les choses.
A qui est-ce qu’on donne le contrôle ?
Tout comme des conquistadores financés par les puissants monarques pour s’emparer du Nouveau Monde, les startups technologiques financent leur croissance exponentielle à base de levées de fonds auprès des fonds d’investissements. L’objectif reste le même : le profit.
Ces sociétés continuent de nous prouver que l’humain a peu de place dans leur schéma : vente de nos données à des fins commerciales, dévoilement de la vie privée, précarité du travail, absence de protection sociale pour leurs partenaires, etc. Mais même si tout le monde le sait, on continue d’utiliser leurs services, parce que au final, c’est quand même bien pratique.
Même si le prix pour le consommateur est inférieur à ce qu’il payait avant, on peut quand même admettre que leur marges sont énormes : entre 5% et 45% de frais sur chaque vente pour Amazon, entre 6% et 12% de frais de service pour AirBNB, 20% de com’ pour Uber… Un peu cher pour administrer un site web me direz-vous !
Pourquoi Uber n’a-t-il pas de concurrence ?
S’il y a tant d’argent à se faire sur ces créneaux, pourquoi est-ce qu’il y a si peu d’acteurs ?
La vraie valeur de ces modèles économiques ne vient pas de leur technologie mais plutôt de la taille de leur réseau. Si les clones de Facebook promettant un vrai respect de la vie privée ont tous échoué, c’est simplement car un réseau social sans tous vous amis, c’est pas très fun. C’est exactement pareil pour les marketplaces ou les intermédiaires de services entre particuliers.
L’important pour ces startups est d’atteindre la masse critique d’utilisateurs qui leur permettra de faire la différence. C’est très difficile d’y arriver, mais une fois là haut, il leur est facile d’imposer toutes leurs conditions et de dégager des bénéfices massifs (et d’embaucher des salariés-rockstars à des salaires indécents).
Et si on trouvait une alternative ?
Comme expliqué plus haut, NOUS sommes la vraie valeur de ces modèles économiques. Nous sommes le vendeur, l’acheteur, le chauffeur, l’hôte, l’Alpha et l’Omega de ce business.
La plate-forme de mise en relation doit être un outil qui sert au vendeur et au client. Le problème, c’est qu’on avance vers un modèle où le vendeur et le client servent la plate-forme de mise en relation. Est-ce qu’on aurait fait autant de progrès si Tim Bernes-Lee, l’inventeur d’internet, avait verrouillé sa technologie pour les entreprises les plus fortunées au lieu de l’ouvrir au monde ? Pas sûr…
Une alternative possible serait que les plates-formes digitales soient développées par les communautés et pour les communautés dans le but de servir leurs intérêts et non ceux des fonds d’investissement qui ont misé dessus.
Les solutions d’économie collaborative commencent à se développer un peu de partout, comme La Louve qui va ouvrir un supermarché où les clients travaillent dans le magasin pour bénéficier de meilleurs produits à prix réduits, et d’une meilleure transparence.
L’avantage avec le digital, c’est que la collaboration y est beaucoup plus facile qu’ailleurs : la distance n’est pas une barrière, et les nombreuses communautés numériques collaborent déjà sur des milliers de projets et partagent leurs découvertes.
Voyons plus loin qu’Uber
Nous sommes encore à la préhistoire du digital. L’Uberisation de l’économie améliore notre qualité de vie et pousse à l’extinction forcée des Dinosaures qui n’ont pas évolué assez rapidement.
La lettre timbrée à été remplacée par l’email et c’est insensé de croire à son retour.
Mais un jour l’extinction des Uber arrivera également. Ce jour arrivera quand les communautés des différents métiers disposeront eux mêmes de technologies suffisantes pour ne pas avoir à se faire utiliser par les Uber.
Et ces technologies c’est à nous les créer ;)
Vous connaissez des initiatives de ce type ? Vous avez une vision différente de ces modèles économiques ? Je serai ravi de lire vos commentaires.